Parlons de violence nutritionnelle

La ministre responsable du Sport, du Loisir et du Plein air, Madame Isabelle Charest, dit vouloir protéger « l’intégrité » des athlètes « au sens très large » et qu’il inclut le « volet » nutritionnel. Qui dans son gouvernement s'inquiète de l'intégrité de l'ensemble de la population face aux gourous de l'alimentation et aux effets négatifs de la publicité?

#Alimentation #Consommation #Publicite #Sante #SanteMentale

La Ministre a aussi déclaré en mêlée de presse ce qui suit: « Il y a beaucoup de gens qui s’interprètent nutritionnistes ou spécialistes de la nutrition et qui vont faire des programmes alimentaires qui sont complètement inappropriés et qui posent des enjeux » (rapporté dans l'article du Devoir où mène le premier lien de mon billet).

Madame Charest se préoccupe avec raison de ces gens qui s'improvisent nutritionnistes et donnent des conseils en alimentation, mais qu'en est-il du rôle que l'industrie alimentaire a joué dans le passé et continue de jouer dans nos régimes alimentaires.

Cette industrie est très présente lors de l'établissement des normes alimentaires, comme l'ont constaté un groupe de chercheurs de l'Université d'Ottawa qui a examiné la fréquence et la nature des interactions entre Santé Canada et des intervenants de l'industrie entre 2016 et 2018.

« Nos recherches démontrent que les acteurs de l'industrie sont très actifs dans leurs tentatives d'influencer les politiques nutritionnelles canadiennes. Les décideurs politiques et les défenseurs de la santé publique devraient être conscients de ces stratégies afin que des politiques alimentaires et nutritionnelles équilibrées et efficaces puissent être développées. »

Il ne faut pas s'en étonner puisque l'objectif premier de l'industrie alimentaire est de faire des profits.

Les spécialistes du marketing qui conseillent les principaux fabricants d'aliments sont bien conscients qu'on ne mange pas pour s'alimenter, mais pour consommer.

Comme le rappelle l'historienne et spécialiste de l'histoire politique des normes associées à la bonne alimentation Caroline Durand , «l’alimentation fait partie de la manière dont, dans le monde moderne, on a une image de ce que c’est qu’un consommateur.»

J'ajoute qu'elle est aussi étroitement liée à l'image de soi. Jeunesse, J’écoute, un service de santé mentale en ligne disponible 24 heures sur 24, 7 jours par semaine, est bien placé pour se savoir. Plus que jamais auparavant, selon ce qu'on peut lire sur son site, les jeunes qui communiquent avec cet organisme parlent d’image corporelle et de troubles alimentaires.

Le secteur alimentaire n'est pas un secteur industriel comme les autres. Ce qu'il s'y fabrique impacte directement la santé de la population et l'environnement (qui en retour impacte notre santé).

Je ne voudrais pas donner l'impression que rien n'est fait pour améliorer la qualité des aliments qu'on nous vend. D'ailleurs, Agro Québecc, une firme de services conseils qui développe et met en œuvre des stratégies de positionnement et de communications spécialisées auprès des entreprises du secteur agroalimentaire au Québec, rappelait en février dernier que l'année 2024 est l'année des décisions en amélioration alimentaire.

Ce qui pend au bout du nez les entreprises en alimentation, c'est l’inscription obligatoire de mise en garde santé sur le devant des emballages, tel que le stipule la nouvelle réglementation fédérale concernant la réduction du sel, du sucre et du gras dans les aliments transformés.

Dans le balado La Scène Agro, animé par Lionel Levac dont la voix a longtems été longtemps associée au monde agricole québécois, on entend Marie-Noëlle Cano, directrice générale d’Amélioration alimentaire Québec, dire que nous serions 60% au Québec à suivre un régime alimentaire.

Il est vrai que ces derniers sont nombreux, au point où Protégez-vous publiait un article en février intitulé Quel est le meilleur régime alimentaire pour vous?

Bon nombre ne sachant plus trop comment bien s'alimenter, il est facile pour les pseudos nutritionnistes d'influencer jeunes et moins jeunes, au point où plusieurs vivent toutes sortes de problèmes de santé liés à une mauvaise alimentation.

De même, l'industrie alimentaire a le champ libre pour faire preuve d'une imagination débordante dans la fabrication et la vente d'aliments qui s'adressent d'abord au consommateur·trice·s avant de répondre à leurs besoins alimentaires réels (rappelons en passant qu'une partie non négligeable de la population souffre d'insécurité alimentaire, comme j'en faisais part dans un billet du 13 avril dernier).

Toute cette violence nutritionnelle nous coûte cher en soins de santé physique et mentale.

Parlons-en pour qu’elle préoccupe encore plus nos deux gouvernements fédéral et provincial.

Source de l’image: https://pixnio.com/fr/flore-plantes/fruits-fr/fraises-photos/strawberriy-cuillere-sucre-fruit-nourriture


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