Suis-je woke?

Je viens de passer un test dont les résultats m’ont amené à réfléchir sur le sens des mots woke et wokisme. Selon ce test, je serais woke à plus de 81,5%. On me dira que les tests, faut en prendre et en laisser, ce sur quoi je serai bien d’accord. N’empêche.

#Culture #Woke #Wokisme

Je reconnais volontiers, comme l’écrivait en 2021 Albin Wagener, chercheur associé l'INALCO (PLIDAM) et au laboratoire PREFICS, Université Rennes 2 , que «si l’on comprend bien qui sont les « anti-wokistes », on ne sait jamais vraiment qui sont les « wokistes », puisque tout le monde peut l’être a priori.»

Est-ce que ça évoque quelque chose si je vous parle de culture de la déconstruction? Pourtant, c’est le terme proposé par la Commission d’enrichissement de la langue française (CELF)”), un organisme qui relève du ministère de la Culture en France, pour remplacer le mot wokisme.

Réfléchissons à cette notion de culture de la déconstruction.

Selon l’Enclyclopédie de l’Agora,

le mot « déconstruction », initialement un choix de Derrida dans De la grammatologie, est un oxymore fusionnant « destruction » (emprunté à Heidegger : Destruktion et Abbau) et « construction ».

Un oxymore, c’est une figure de style qui allie deux termes qui semblent se contredire.

La question à se poser est de savoir si le wokisme est effectivement une pensée qui vise à détruire ma culture, héritée de la pensée essentiellement occidentale, pour la construire sur de nouvelles bases, plus inclusives des autres cultures.

Ce qui serait un juste retour des choses. On oublie en effet à quel point la culture occidentale, dans laquelle je baigne depuis ma naissance, a été influencée par d’autres cultures, notamment la culture du monde arabe

De la naissance de l'Islam, au VIIe siècle, à la Renaissance, l'Europe obscure a été illuminée par les découvertes scientifiques d'une civilisation arabe inventive et créative. Au grés de ses conquêtes et échanges commerciaux, le monde arabe a diffusé ses savoirs dans le monde alors connu. Civilisation arabo-musulmane : quel apport en occident ? RTS. 3 avril 2011.

De fait, ma civilisation a absorbé beaucoup d’éléments des autres civilisations qu’elle a conquises. Toutefois, elle n’a pas pour autant accepté que les personnes qui vivaient et qui vivent là où ces autres civilisations sont nées et ont pris essor, soient leurs égales.

Il faut lire l’entrevue qu’a donnée l’Innue Mélissa Mollen Dupuis à la revue Possibles pour le saisir).

Dans la même revue, les femmes asio-américaine, latina et afro-américaine Aeriel A. Ashlee, Bianca Zamora et Shamika N. Karikari expliquent ce qu’est la conscience woke:

Nous définissons la conscience woke ( wokeness ) comme une conscience critique des systèmes d’oppression imbriqués. Plus précisément, être une personne woke consiste à incarner une conscience particulière, une identité politique irréductible qui reconnaît l’oppression telle qu’elle existe dans les expériences individuelles et collectives. Nous sommes wokes : auto-ethnographie critique par trois étudiantes américaines

Il y a plusieurs formes d’oppression, d’injustice et de discrimination contre lesquelles il faut s’insurger.

J’en mensionne une dernière: le binarisme, ce «système de pensée institutionnalisé qui catégorise l'éventail des identités de genre en deux genres distincts, opposés et immuables» (définition de l’OQLF). Un système de pensée qui a pour conséquence d’attiser la discrimination, la haine et même la violence envers toute personne qui n’y correspond pas.

En conclusion, c’est contre le refus de l’altérité que luttent celles et ceux qu’on dit woke dans une tentative de dérision.

Alors que ça signifie que leur conscience est éveillée.


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