Pourquoi le mouvement coopératif n'est-il pas plus étendu?

Au Québec, selon les chiffres du gouvernement québécois, il y a environ 3 300 coopératives et mutuelles. C'est bien peu comparé aux 278 000 entreprises qui emploient au moins une personne. Qu'est-ce qui explique que cette forme collective d'entreprenariat ne soit pas plus répandue?

#Cooperatives #Economie #EconomieSociale

Rafael Ziegler qui est professeur en management au Hautes Études Commerciales de Montréal pose la question autrement dans le texte L'économie circulaire stagne. Et si le modèle coopératif servait d'inspiration ? publié en juin dernier sur le site La Conversation.

Après avoir affirmé qu'il n'y aura pas de durabilité sans faire de changements dans l’économie, il se demande si l’élément manquant pour la transformation ne serait pas une organisation plus démocratique de l’économie. Rafael Ziegler n'est cependant pas naïf en précisant plus loin que toutes les coopératives ne sont certainement pas vertes ou circulaires.

Je suis d'accord avec lui mais ce que je retiens de son article c'est cette idée d'une organisation plus démocratique de l'économie. À prime abord, c'est une idée séduisante, pourtant elle a peu d'adhésions si on la compare à l'organisation réelle de l'économie.

C'est d'autant plus étonnant que les coopératives ont nettement un meilleur taux de survie que les entreprises privées.

Luc K. Audebrand, professeur titulaire de la Chaire de leadership en enseignement sur l’engagement social à l’Université Laval, croit que les idées préconçues sur les coopératives n'aident pas. Notamment le mythe qu'une coopérative est moins efficace qu'une entreprise privée, aussi celui qu'elles sont l'équivalent d'organismes communautaires ou à d'organismes à but non lucratif.

Il y a de ça, mais il y a aussi le peu de considérations qu'on leur accorde autant dans l'enseignement (dans une école de gestion, 1% de l’enseignement s’intéresse aux coopératives) que dans les programmes gouvernementaux de soutien aux coopératives, sans compter toutes sortes d'obstacles légaux et réglementaires.

Toute la vision de l’économie est basée sur l’entreprise Inc. La coopérative, c’est un élément énervant dans ce système-là. (...) Il y a plein de freins institutionnels, culturels, normatifs, légaux et paralégaux qui font en sorte que les coopératives ne peuvent pas prendre autant de place qu’elles devraient avoir au pays. Luc K. Audebrand. Cité dans La coopérative, plus qu’un modèle de survie, par Chloé Pouliot, Le Soleil.

Le Soleil, en passant, fait parti d'une coopérative de travail, avec Le Droit, La Tribune, Le Quotidien, Le Nouvelliste et La Voix de l’Est.

Sur l'aspect légal, la directrice générale du Conseil québécois de la coopération et de la mutualité (CQCM), Madame Marie-Josée Paquette, soulignait en septembre dernier, dans une entrevue publiée sur le site du Barreau du Québec à propos du repreneuriat collectif, que « la loi sur les coopératives est complexe et peu d’avocats la connaissent suffisamment pour répondre aux besoins des coopératives en matière légale, »

Quant au soutien des gouvernements fédéral et provincial, ça s'améliore mais c'est encore les entreprises privées qui ont la part du gâteau.

Plutôt que de systématiquement envoyer de l’argent par millions et milliards à des organismes publics ou à des entreprises privées toujours plus assoiffés, j’invite le gouvernement à appuyer davantage l’autonomisation des collectivités grâce aux entreprises collectives. J. Benoit Caron, Directeur général du Consortium de coopération des entreprises collectives.

Selon ces chiffres couvrant la période 2013-2023, le ministère de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie du Québec a accordé plus de 13 milliards $ en aide financière aux entreprises – principalement des prêts, des investissements en capital-actions et des subventions. Imaginez si on ajoutait les sommes venant du Fédéral!

Je ne sais pas combien les coopératives et les autres formes d'entreprises collectives ont reçu dans la même période, mais c'est sûrement nettement moins.

Dans mes recherches pour ce billet, j'ai découvert que les coopératives de services sont une des solutions pour favoriser une meilleur accessibilité aux soins de santé dont je vous parlais hier.

La Fédération québécoise des coopératives de santé (FQCS) rappelait récemment que les coopératives de santé s’activent depuis plus de 25 ans pour répondre à une demande exponentielle en matière d’accès à la première ligne, particulièrement dans les communautés rurales et périurbaines.

Initialement considérées comme des solutions temporaires, elles ont au contraire démontré que le modèle coopératif en santé était un outil durable et puissant de résolution des problèmes. Le modèle coopératif : un pilier majeur du droit à la santé au Québec. 7 avril 2024

Être membre d'une coopérative de santé, la bonne idée! Encore faudrait-il qu'il y en ait partout au Québec.

De ce que j'ai compris en terminant, l'entreprenariat collectif sous forme de coopératives n'est pas assez pris au sérieux comme alternative au modèle de l'entreprenariat privé.

Il gagnerait pourtant à l'être.


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